La main de Bouddha

Dessin Main de Bouddah

La main de Bouddha… quel nom  étrange pour un citron ! La première fois que je découvris ce curieux fruit en photo, aux allures de petite pieuvre ou de main aux doigts multiples, je le pris pour une œuvre d’art loufoque, sortie de l’imagination de nos artistes réfugiés dans le sud au siècle dernier comme Dali ou Picasso. La photo étant en noir et blanc, son cousinage avec le Citrus, sur le grand arbre botanique des agrumes, n’avait rien d’évident.

Ainsi quel plaisir de voir ce curieux cédrat  pour de vrai dans une serre des Pyrénées orientales au cœur de la plaine du Roussillon. La douceur du climat hivernal se marie avec une certaine humidité due à la proximité de la mer, ce qui est parfait pour les cédrats. Partout ailleurs, une culture en pot est incontournable, et reste le seul moyen de le conserver dans le temps.

Pendant ces quelques jours de vacances au seuil de l’année 2021, j’ai été accueillie par le pépiniériste Mathieu Vessieres qui m’a entr’ouvert le royaume délicatement parfumé des cédratiers. Quelle chance, quand le fruit vire du vert au jaune citron, entre novembre et janvier, car c’est la période de pleine maturité, un authentique délice !

A l’instar d’autres agrumes rares tels le yuzu, le citron caviar, la mandarine japonaise, la bergamote, le Kumquat giganteum, le pomelo ugli, le tangelo lo, l’orange du Vatican aux étranges rayures, ou encore le citron Meyer de couleur orange, il ravit les grands cuisiniers qui raffolent de ses arômes puissants.

En France, la main de bouddha est un arbre décoratif aux rameaux épineux  et aux feuilles ovales et vernissées, d’un beau vert clair. Cet agrume a une peau épaisse et très peu de chair, il ne donne donc presque pas de jus et souvent il n’y a pas de pépins non plus. Il a besoin de quatre  à cinq heures d’ensoleillement par jour mais ne supporte pas la forte chaleur, ni la sécheresse. Toute la question consiste à gérer le stress hydrique. En été, le cédrat apprécie de conserver ses racines au frais, sans pour autant avoir les racines détrempées. Durant l’hiver, un ou deux arrosages par mois suffisent aux besoins d’une main de bouddha hivernée qui aime les terres riches et organiques. En pleine terre, il vaut mieux pailler ses pieds pour garder un peu de fraîcheur. Ses grandes fleurs blanches, aux boutons pourpres, s’épanouissent essentiellement au printemps mais remontent parfois en arrière-saison, dégageant un parfum exquis.

En Asie, ses fruits sont utilisés comme porte-bonheur. C’est donc le fruit idéal pour vous souhaiter à la chinoise ; fertilité, longévité et prospérité pour l’an 2021 à quoi j’ajouterai, en cette période de crise sanitaire, bonne santé !

Raphaèle Bernard-Bacot

Parution 18 juin 2020